La médiation : une digue face à la « grande démission » ?
Tribune libre
Partira ou partira pas ? A l’instar du « quiet quitting » américain, la France fait face à un taux de démissions particulièrement élevé. Un nombre important de salariés choisissent de quitter leur travail. Au point que pour nombre d’entreprises, en termes de ressources humaines, s’ajoute à l’enjeu du recrutement celui de « fidéliser » ses collaborateurs. La médiation peut être un des outils à la disposition des chefs d’entreprises et des managers pour faire face à cette nouvelle donne.
La grande démission dans les entreprises : une tendance lourde ?
Dans un rapport publié en octobre dernier, la DARES fait état d’un taux de démission (2,7%) très élevé des salariés. Certes, il n’est pas inédit : la situation était similaire suite à la crise financière de 2008. Mais depuis, il n’avait jamais atteint un tel niveau. Cependant, le contexte était fort différent pour les entreprises et un certain nombre d’éléments peuvent attirer l’attention dans la situation actuelle. Tout d’abord, ce taux de démission n’est pas associé à une augmentation du nombre de retraits du marché du travail, et le taux d’emploi reste élevé malgré une situation économique qui n’est pas nécessairement favorable.
De plus, le nombre de démissions atteint un très haut niveau alors que le marché du travail est par ailleurs en tension, notamment avec d’importantes difficultés de recrutement pour les dirigeants ou les services ressources humaines. Il est de plus à noter que le retour à l’emploi des démissionnaires est rapide. Il s’effectue le plus souvent au bout de quelques mois, dans le même secteur d’activité, voire sur le même type de poste.
Le phénomène s’apparente donc plutôt à un changement d’employeur. Ce qui a pour conséquence de modifier fortement, et sans doute de manière durable, le pouvoir de négociation des salariés. Avec en perspective un impact important sur le niveau des salaires et la prise en compte des conditions de travail.
Fidéliser talents et compétences dans l’entreprise : un enjeu pour les employeurs
Au regard de ce qui semble être considéré par bien des observateurs comme une évolution significative du rapport au travail et à l’entreprise, attirer mais également fidéliser les collaborateurs devient un enjeu stratégique en matière de gestion des ressources humaines. Le départ d’un collaborateur est une perte pour l’entreprise, à tous points de vue. Dès lors, face à l’expression d’une volonté de démission, quand l’attitude qui prévalait était le plus souvent de prendre acte (même à regret…), le contexte actuel rend probablement plus pertinent pour les managers d’envisager une approche plus collaborative, avec pour objectif d’infléchir cette volonté de départ. Ce qui ressort des différentes analyses est que l’on quitte moins un métier qu’une entreprise, moins une entreprise qu’un manager ou une organisation du travail. Que l’on ne recherche plus exclusivement une rémunération mais aussi des conditions de travail, des valeurs, du sens, un équilibre vie perso - vie professionnelle.
Certes, il ne faut pas être naïf : ces éléments fluctuent avec le secteur d’activité, les types de postes, le niveau de formation, de responsabilité, etc… Il n’en demeure pas moins que si ces facteurs sont des éléments de pression sur l’employeur qui peuvent lui paraître fragilisant, ils peuvent aussi être considérés comme autant de leviers sur lesquels il est possible d’agir, de discuter, d’évoluer, de construire. De part et d’autre.
La médiation en entreprise : la recherche du gagnant-gagnant
C’est ici que l’intervention d’un médiateur en entreprise peut trouver tout son sens. Car la médiation, par essence, est un outil fondamentalement collaboratif. Elle est fondée sur l’expression des besoins de l’ensemble des parties concernées, un cheminement qui permet de dépasser les positions tranchées, clivées. L’expérience montre que le cadre confidentiel et sécurisé de la médiation permet d’explorer toutes les options en matière d’organisation du travail, de relationnel, de répartition de la charge de travail, de reconnaissance.
Cette démarche implique toutefois que l’entreprise ou l’organisation soit prête, le cas échéant, à entendre les idées, remarques, souhaits concernant l’organisation du travail qui peuvent émerger de ce type d’espace de discussion. L’accompagnement et l’écoute d’un tiers, neutre et impartial, permet alors de transformer le couperet de la volonté de démissionner d’un salarié en première étape vers la construction d’une solution partagée et tournée vers l’avenir. Souvent, les valeurs communes émergent. Les compétences sont mises en exergue, reconnues. Les incompréhensions sont éclaircies, les attentes sont posées sereinement et détachées des questions de personnes.
La médiation ne dépossède pas l’encadrement ou le chef d’entreprise de ses prérogatives légitimes. Elle est au contraire un outil supplémentaire à sa disposition. Un outil de surcroît peu coûteux, concret et rapidement opérationnel qui peut contribuer à l’émergence de solutions conçues par les personnes concernées elles-mêmes. Car, de fait, ce sont elles les experts incontestables de la situation. Au-delà de cette intervention « curative », ne serait-il pas également pertinent d’envisager une dimension préventive, pour traiter en amont cette difficulté, par le biais d’espaces de régulation institués au sein de l’entreprise ?
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