Position d'un magistrat face à la séparation conjugale
Propos recueillis par Laurence Hanin-Jamot sous forme de questions / réponses
Le 22 novembre dans le cadre de la Semaine de la parentalité, Marc Juston, ancien Juge aux Affaires Familiales, exerçant actuellement en qualité de magistrat à titre temporaire au TGI de Aix en Provence, est intervenu au 9ème Forum de la famille de Sartrouville.
Fermement convaincu de l’utilité de la médiation familiale, il nous livre son opinion de magistrat sur "comment se positionner quand on est professionnel lors de la séparation conjugale". Un point de vue riche de réflexions pour le médiateur familial.
1- Quel est l'effet sur l'enfant de la séparation conjugale de ses parents ?
L’enfant est souvent l’oublié des séparations parentales, et souvent maltraité psychologiquement.
Il est l’enfant Roi, mais il est aussi souvent l’enfant Proie de nombre de séparations parentales.
Mon postulat :
Il est démontré que ce n’est pas la séparation ou le divorce des parents qui blessent les enfants, mais c’est le conflit des parents, qui les perturbe, qui souvent les maltraite.
Des statistiques :
- • 70 % des saisines des Juges des enfants proviennent des procédures des Juges aux affaires familiales,
- • 40 % des enfants ne voient plus ou presque plus les parents chez lesquels ils ne résident pas,
- • 40 % des séparations concernent des enfants de moins de 5 ans,
- • 37 % des séparations sont conflictuelles.
2- Quelle est la vocation des Juges aux affaires familiales, mais aussi l’objectif de tous les professionnels de la famille et de l’enfance ?
La vocation du Juge aux affaires familiales est de régler le maintien des liens familiaux dans le cadre d’une séparation, dans l’intérêt de l’enfant, au nom de trois principes établis par la loi :
- L’autorité parentale
Entre les parents, même séparés, le lien familial est formalisé en droit par l’autorité parentale, qui appartient aux deux parents.
Un enfant doit avoir accès à ses deux parents pour se structurer, grandir et devenir un adulte. Il n’y a pas un parent supérieur et un parent inférieur.
Toute décision prise par le Juge qui va à l’encontre de ces principes doit être motivée.
Tout professionnel qui intervient auprès d’une famille ne doit pas oublier que, sauf rares exceptions, ses parents, mêmes séparés, sont titulaires ensemble de l’autorité parentale et ont les mêmes droits et les mêmes devoirs.
- L’intérêt de l’enfant
« L’intérêt de l’enfant doit être la considération déterminante dans l’adoption des lois, ainsi que le guide de ceux qui ont la responsabilité de son éducation et de son orientation ».
Déclaration des Droits de l’Enfant dite Convention de New York du 20 novembre 1959.
Le Juge aux affaires familiales, quand il prend une décision, doit toujours se référer à l’intérêt de l’enfant.
La notion d’intérêt de l’enfant est toutefois une notion abstraite, subjective, très aléatoire, c’est une formule obscure, vague, une notion vide, une position de principe qui n’est pas définie par le législateur.
- L’apaisement des séparations
L’objectif principal du législateur, dans l’intérêt des familles, dans le souci notamment de protéger les enfants, est de tendre à l’apaisement des séparations, en utilisant, à titre principal la médiation familiale.
3- Quel est l’intérêt de la médiation familiale ?
Pour amener les parents à respecter ces trois normes, le législateur a légalisé la médiation familiale. Elle est l’outil principal des séparations/divorces, que doit utiliser le juge aux affaires familiales.
- Définition de la Médiation Familiale
La médiation familiale est un processus volontaire, structuré, confidentiel mené par un tiers formé (diplôme d’État de médiateur familial), neutre, impartial et indépendant, ayant pour objectifs de permettre aux parents de renouer un dialogue et de trouver par eux-mêmes les solutions pérennes dans l’intérêt de leur enfant.
- Les raisons principales d’un recours à la médiation familiale
- Permettre aux parents d’apaiser leur séparation, de se responsabiliser, d’être valorisés, de prendre eux – mêmes les décisions notamment celles pour leurs enfants et de rester à la première place,
- Réfléchir à la mise en place d’une coparentalité, dans l’intérêt de l’enfant,
- Permettre aux parents de travailler à la fois le conflit (les non-dits, les malentendus, les silences, le mensonge, les torts, les griefs, les blessures), et le litige (la problématique soumise au juge)
- Lutter contre l’aléa judiciaire. Le Juge n’est pas un ordinateur, la vérité judiciaire n’existe pas.
4- Et pour finir quelle serait votre conclusion ?
Travailler sur le thème de la « Séparation Conjugale » nécessite de réfléchir en partenariat, entre tous les professionnels de la famille et de l’enfance, et de mettre en place une politique, dans chaque ressort, permettant aux parents citoyens, quelque soient leurs difficultés familiales, d’être acteurs de leur propre séparation, l’enfant en sera toujours gagnant.
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